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2001 : Accueil Thérapeutique : Quand la famille soigne

Auteur : Geneviève Darles, dans Déclic, le magazine de la famille et du handicap n° 81 - novembre 2001

Alternative au placement en établissement spécialisé, la famille d’accueil famille d'accueil Terme désuet et imprécis remplacé, depuis 2002, pour l’accueil d’adultes âgés ou handicapés, par l’appellation accueillant familial. Saisir "famille d’accueil" sur un moteur de recherche conduit à des sites traitant de placements d’enfants et/ou d’animaux maltraités : cherchez plutôt "accueil familial" ou "accueillants familiaux" ! thérapeutique est une solution développée par les hôpitaux psychiatriques. Rencontre avec Joëlle
 [1]
, engagée depuis huit ans.

Dans la famille de Joëlle, Georges, puis Marie et Annie ont trouvé un nouveau foyer transitoire pour les aider à se restructurer et à sortir du cocon de l’hôpital psychiatrique.
Joëlle vivait pourtant bien loin du monde du handicap mental avant de devenir, avec son mari et ses enfants, une famille d’accueil thérapeutique. « Assistante commerciale licenciée économique, je souhaitais retravailler tout en m’occupant de mes enfants, alors âgés de 2 et 3 ans. J’étais aussi attirée par la dimension sociale de l’emploi. » Sélectionnée après un entretien avec des membres de l’équipe médicale de l’hôpital psychiatrique, Joëlle découvre l’essentiel de son rôle : aider, par la simple vie en famille, des patients souffrant de troubles psychologiques. La prise en charge dure souvent plusieurs années, à temps plein ou à temps partiel selon les cas et les difficultés à affronter.

C’était leur grand copain

Accepter chez soi des personnes fragilisées n’entraîne pas forcément leur retour à une vie normale, et c’est la première leçon à retenir : cette formule transitoire peut ne pas toujours se révéler bénéfique. Au moment du placement, l’avenir des personnes accueillies reste incertain : entrée en foyer, intégration en appartement spécialisé, accès à une vie autonome ou retour à l’hôpital, tout est possible.

Pour Georges, le bilan est positif. Arrivé chez Joëlle en 1993 après avoir passé vingt ans en hôpital psychiatrique, il y est resté cinq ans. « Brouillé avec sa famille, il a retrouvé ses marques ici, montrant vraiment l’envie de ne pas réintégrer un milieu hospitalier. Il partait régulièrement se balader et, un soir, il n’est pas rentré. Il avait pris le bus et loué une chambre à Bordeaux, puis il est revenu tranquillement chez nous. Cette mini - échappée nous a dévoilé ses potentialités et prouvé qu’il n’avait pas tant que cela peur de la vie. » Entre balades, jardinage et cuisine, Georges a trouvé une autonomie. Il vit aujourd’hui en appartement ordinaire, fréquente des amis... « Nous sommes restés liés. Nous le voyons encore très souvent. Nos enfants, avec lesquels il adorait jouer comme un gamin, l’ont sans doute beaucoup aidé et rassuré. C’était leur grand copain. »

La prise de repères fut plus laborieuse pour Marie, 39 ans, accueillie deux ans après Georges. « Elle voulait tout le temps faire les mêmes choses à la même heure. » Puis, avec le temps, elle s’est passionnée pour l’encadrement et, surtout, elle est sortie d’une anorexie. « Marie est arrivée ici avec un fort dégoût des aliments, ne pesant plus que 36 kilos. Aujourd’hui, elle n’est plus écœurée par la nourriture, et elle a appris à ne pas se conduire de façon autoritaire et exigeante. Elle sait qu’elle ne peut pas être constamment le centre du monde. » Marie devrait intégrer prochainement un foyer car ses parents, chez qui elle rentre encore deux jours par semaine, ont vieilli et ne peuvent plus l’accueillir à temps complet depuis ses deux années d’hospitalisation.

Toute la famille doit être partie prenante

Voici deux ans qu’Annie, 44 ans, hospitalisée depuis l’âge de 20 ans, a rejoint la maisonnée. Mais elle retourne à l’hôpital trois jours par semaine. « Son angoisse se transforme en violence verbale et en paranoïa. Elle se montre jalouse de ma fille de 10 ans. »

Depuis longtemps, les enfants de Joëlle ont dû prouver leurs capacités à prendre du recul. Pour elle, rien ne vaut le dialogue pour crever l’abcès. « Parfois, ces situations sont pesantes, nous aimerions passer plus de temps avec nos enfants. Heureusement, nos voisins et amis ont bien accepté la situation. Le découragement nous gagne parfois, lorsqu’on a l’impression de ne rien apporter à la personne. Alors un sourire, une gentillesse permettent de repartir. Voir Annie oser enfin se rendre dans un supermarché, prendre le car et lutter contre sa peur de l’autre nous semble déjà formidable, même si l’on espère toujours mieux. »

Joëlle dit ne pas regretter son choix. « Notre travail est valorisant, enrichissant. Notre peur de la maladie mentale a disparu depuis que l’on a dû faire l’effort de se mettre à la place de nos pensionnaires pour mieux les comprendre. En famille, on ne peut plus masquer nos sentiments face à l’autre. »

Geneviève Darles

Ressources

Vous trouverez un forum de familles d’accueil et des informations sur le développement des alternatives au placement en établissement spécialisé sur le site Internet http://www.famidac.free.fr ou http://www.famidac.fr.st (anciennes adresses de famidac.fr)

Devenir famille d’accueil thérapeutique

Développé depuis le début des années quatre-vingt-dix, l’accueil familial Accueil familial Alternative au maintien à domicile et au placement en établissement spécialisé : les personnes handicapées ou âgées sont prises en charge au domicile de particuliers agréés et contrôlés par les conseils départementaux (ou par des établissements de santé mentale). L’accueil peut être permanent (contrat conclu pour une durée indéterminée) ou temporaire, à temps complet (24h/24) ou à temps partiel (exemple : accueil de jour), ou séquentiel (exemple : un weekend tous les mois). thérapeutique est aujourd’hui présent dans une majorité de secteurs de psychiatrie. Les critères de sélection des familles d’accueil varient d’un centre hospitalier à l’autre, les conditions de rémunération aussi. Les salaires ainsi que les indemnités d’entretien sont versés par l’hôpital. Il n’est pas indispensable de posséder une expérience liée à la prise en charge de troubles psychologiques. Sur le plan du logement, la personne accueillie doit pouvoir disposer d’une chambre avec un minimum de confort (chauffage, notamment). Il faut aussi être disponible et à son écoute, en conséquence le travail à l’extérieur n’est pas permis. Les familles bénéficient d’entretiens réguliers avec les équipes soignantes, mais, malgré une loi votée dernièrement à ce sujet, la plupart d’entre elles n’ont toujours pas accès à une réelle formation.

Notes

[1Joëlle est Administratrice de l’association Famidac